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Contre l'Espagne, objectif perfection

Pour venir à bout de l'Espagne, Laurent Blanc aimerait que son équipe joue son jeu, tout en admettant que cela sera compliqué. La France s'en sortira avec intelligence et discipline.


L'Espagne est au football ce que l'Everest est à l'alpinisme. Le sommet des sommets. Le gravir est possible. Mais requiert des qualités hors-normes. Depuis quatre ans, en compétition internationale, seule la Suisse à réussi à faire trébucher la Furia Roja (0-1). C'était en 2010 et l'on mettra ça sur le compte d'une mise en route un peu laborieuse. La suite et l'épilogue de Johannesburg ont validé la thèse de l'accident. Deux ans plus tard, l'équipe de France se retrouve sur la route de cette Espagne dont l'invincibilité ne parait plus aussi évidente que par un passé récent. Cependant pour en donner la preuve ultime, reste à savoir comment s'y prendre. Et à cette heure, deux solutions circulent dans la tête de Laurent Blanc.
"J'ai regardé Espagne - Italie et Croatie - Espagne. Les deux ont posé des problèmes à cette équipe. Ils ont eu des occasions. Mais il y en a une qui a préféré défendre et l'autre qui a tenté de jouer son jeu. J'espère que l'équipe de France choisira la deuxième solution", a confié Laurent Blanc mercredi. Un vœu pieux qui pourrait rapidement se heurter à la réalité du terrain. Ce que le sélectionneur ne nie pas. D'autant que si les Bleus souhaitent évoluer comme ils l'ont fait depuis le début de la compétition, Suède mise à part, cela signifie tenir le ballon, redoubler les passes et dézoner. A l'espagnole. Et espérer que la copie soit meilleure que l'original. Ce qui n'arrive jamais. Ou presque.
Depuis le début de l'Euro, les champions du monde et d'Europe présentent la possession de ballon la plus importante des seize qualifiés (71,3%). Rien de surprenant. Les Bleus, eux, sont deuxièmes, mais à quelques encablures tout de même (55,8%). Priver les Espagnols du ballon, les faire courir derrière et transformer le chat en souris serait fantastique, mais parait relever de l'impossible. A ce moment de son histoire, l'équipe de France n'en a pas les moyens. Et ça aussi, Blanc l'a bien compris : "Si on tente de d'avoir le ballon et qu'on réussit à le tenir plus qu'eux, ce sera un exploit."
"L'intelligence de jeu, c'est rare"
Entre les lignes, il n'est pas difficile de lire et de comprendre que le sélectionneur s'attend avant tout à voir son équipe subir, comme tout le monde face à l'Espagne. Il faudra donc réussir le match parfait ou quasiment. "Les quelques opportunités que l'on aura, il faudra les jouer à fond", estime Blanc, qui peut s'appuyer sur ce qu'il a vu en février en Allemagne (1-2). Ce soir-là, les Français avaient réalisé la prestation idéale. Sans être impressionnants dans l'entre-jeu, ils avaient réussi à contrer une équipe dominatrice en alliant caractère, solidité et vitesse. Cocktail parfaitement dosé auquel il faudra ajouter une bonne dose de solidarité. Parce que samedi, les ressorts ne seront pas que techniques :"Les Croates ont joué avec leurs qualités mais ils ont fait preuve d'une solidarité incroyable et ont joué jusqu'à la mort jusqu'à la 90e. L'Italie a joué son propre jeu et a fait preuve de solidarité aussi', rappelle le sélectionneur.
La solidarité, certes, et la discipline, serait-on tenté d'ajouter, tant les Bleus ont conscience qu'il va falloir courir et quadriller le terrain comme jamais depuis le début du Championnat d'Europe. Florent Malouda a connu ça il n'y a pas si longtemps avec Chelsea face au FC Barcelone. Cela demande de l'implication, celle-là même dont certains n'ont pas fait preuve jusqu'ici dans le repli défensif. Si les dix joueurs de champ n'en sont pas capables ou n'en ont pas l'envie, l'édifice se brisera. Mais même comme ça, le milieu de terrain des Bleus sait qu'il y aura des trous : "Même en courant bien, ils vont trouver la faille. Il faudra leur poser des problèmes quand on aura le ballon." En jouant vite et, surtout, intelligemment. Sans doute le plus difficile.
"Il faudrait trouver des joueurs qui jouent plus simplement, de manière espagnole. Il faut jouer dans les intervalles, faire en sorte que les arrières dédoublent. Les Espagnols le font les yeux fermés, reconnait Laurent Blanc. C'est de l'intelligence de jeu, une qualité de plus en plus rare dans le football. Si on avait ça, ce serait mieux que des joueurs qui sont capables d'exploits individuels." Les deux, ce serait encore mieux.